INCIVILITÉS / DÉLINQUENCE / CRIMES
Les dérapages du Velib’
Maladresses, infractions au Code de la route, vols de vélos... Le nouveau mode de transport qui fait fureur à Paris rencontre ses premières difficultés. Plus de 2,5 millions de locations en quarante cinq jours de circulation, un effet de mode évident: le Velib’ a le vent en poupe. Mais les 70 000 locations quotidiennes et le comportement parfois hasardeux des «velibistes» mettent ces deux-roues à rude épreuve. «Chaque jour, une cinquantaine de vélos sont conduits dans un atelier pour être remis en état», explique France Pelé, à la mairie de Paris. 250 vélos endommagés sont déjà définitivement hors service. S’y ajoutent 150 vols. Cet été, la police urbaine de proximité (PUP) a d’ailleurs interpellé plus de 100 voleurs. Au total, 400 vélos ont donc été remplacés, sur un parc qui en compte 10 600. «Ce chiffre n’est pas anodin», regrette Rémi Pheulpin, directeur général Recherche et production de JC Decaux chargé des operations Velib’. Les libertés prises avec le Code de la route peuvent aussi coûter aux utilisateurs de Velib’. En effet, à la mi-juillet, le Conseil de Paris a demandé à la PUP de renforcer la verbalisation contre les cyclistes imprudents. Dès lors, les agents traquent les contrevenants à deux roues, et les soumettent à l’Alcotest en cas de zigzags suspects. «Nous avons réalisé plusieurs interpellations de personnes circulant à Velib’ sous l’ influence de l’alcool et de stupéfiants», note Roland Maucourant, chargé de la sécurité routière à la prefecture de police. Les contrôles se font aussi la nuit. Car, à I’heure où ferment les stations de métro et où les barmans servent les derniers verres, des velibistes nocturnes prennent d’assaut les pavés parisiens. 3 000 locations sont enregistrées chaque nuit, entre minuit et 6 heures. Au palmarès des fautes: le feu rouge grillé, la conduite à contresens et le slalom sur les trottoirs. Il en résulte des contraventions de quatrième classe, de 90 euros minimum. «En 2006, 3 800 procès verbaux ont été distribués aux cyclistes. C’est très peu, estime Roland Maucourant. Ce chiffre pourrait doubler avec le développement des Velib’». Car le comportement des velibistes n’est pas toujours exemplaire. Si, de l’avis de la RATP et de la mairie de Paris, la cohabitation entre Velib’, voitures et bus est «plutôt bonne», de petits accrochages ont émaillé l’été. Ainsi, lors des quinze premiers jours d’utilisation, onze accidents de Velib’ ont été recensés. Un chiffre qui n’est pas pris à la légère par les services de police, sachant que la moyenne avant l’arrivée du Velib’ était de 50 accidents de vélo par mois. A Lyon, ce sont les Vélo’v qui se croisent dans les rues depuis 2005. En deux ans, le trafic de vélos a augmenté de 80%, et les accidents seulement de 6%. Mais les cyclistes ont leurs détracteurs. Pascal Wilder, président de la Fédération des taxis indépendants pour le Rhône, s’agace de cette invasion: «Ils roulent sur des couloirs prioritaires et nous poussent à commettre des infractions», dénonce-t-il. Dans la capitale, la rentrée de septembre changera la donne. Plus de bornes, plus de Velib’, plus de trafic, et donc un risque majeur d’incidents potentiels. Rémi Pheulpin, de JC Decaux, a conscience que la rentrée sera un nouveau baptême du feu pour le Velib’. «Ça va être une autre histoire. On va assister au retour des gens stressés. Il va falloir que tout ce petit monde apprenne à cohabiter sur la route.» Alexandre Le Drollec et Thomas Saintourens - L’Express 6/9/2007 |